mercredi 27 mai 2015

La notion fondamentale et la tradition primordiale (1ère partie)




Dans les études traditionnelles et je fais référence principalement à l'enseignement d'Ibn Arabî (1), il y ressort, en analyse des textes, des données fondamentales sur les symboles sacrés. Ceux-là, et avec l'étendu des formes qu'ils revêtent dans chaque tradition, cristallisent à des degrés différents et y sont afférents à une seule réalité [haqîqa]. Jésus salut sur lui malgré la considération par les uns de sa double nature, divine et humaine (2), et malgré la restriction par les autres à sa seule nature humaine ou divine, ne rendait il pas une forme donnée, à l'instar du oiseau, par l'insufflation, la vie à ce dernier par la permission de Dieu 'azza wa jalla.

La notion de l'insufflation sous permission de Dieu exprime à la fois l'élection de Jésus paix su lui par son Seigneur 'azza wa jalla en tant que Prophète (3) mais en outre elle exprime sa prédisposition naturelle douée d'Esprit et de forme. Dieu exalté soit Il n'a t-Il pas créé Adam paix sur lui selon sa Forme. C'est grâce à l'insufflation que Dieu 'azza wa jalla a créé Adam  : "Et lorsque Je l'aurai formé parfaitement et lui aurai insufflé de Mon Esprit, vous (les Anges) devrez tomber devant lui en prosternation" (Cor.15,29 et 38,72). C'est ainsi que chaque être renferme en lui le secret de l'insufflation d'Allah 'azza wa jalla. Réfléchissez chères sœurs et frères, vous qui êtes doués de coeur!

Ibn Arabî qualifie Aîssâ paix sur lui dans un vers introductif du chapitre 20 des Futuhât al Makkiyya ainsi : La science de Aîssâ est celle dont les créatures ignorent la valeur. Par cette science il redonnait vie à un être dont la terre était la tombe. L'Insufflation équivalait à l'autorisation de Celui qui y réside caché, et Son Commandement créateur [d'Allah 'azza wa jalla]. Adam et Jésus paix sur eux sont frères, Dieu 'azza wa jalla leur a accordé une forme humaine [Jésus prédispose d'une forme d'Insufflation représentative de par la manifestation en forme humaine de Gabriel à Marie, ...] et leur a insufflé de Son Esprit. Même Jésus, comme tous les hommes [et femmes], est fils d'Adam par sa Mère Maryâm paix sur elle.

Nous portons, certainement, en nous mêmes ce revêtement adamique qui est la conséquence immédiate du "KUN" d'Allah 'azza wa jalla car Il dit : "ET s'Il aurait voulu [volonté existentielle] dire à une chose Sois et celle-ci [immédiatement] est". Kâf Waw Nûn, neuf lettres à l'image de la création des 9 cieux (4), qui n'est que le carré du nombre 3. Chaque chose créée par Dieu 'azza wa jalla porte en elle-même le caractère principielle de ce carré, mais seul l'Homme Parfait (5] synthétise en lui la manifestation suprême, elle même comme la synthèse des royaumes. Cette notion relative à Adam paix sur lui est fondamentale, M. Valsan en a illustré le symbolisme sacré dans le Triangle d'Androgyne. Il sous-tend une abréviation développée du nom d'Adam paix sur lui, à savoir, Adam-Dâwûd-Muhammad prières et saluts sur eux.

Ceci n'est pas sans rapport avec la tradition primordiale [initiale] qu'Adam paix sur lui a reçu de la part de Dieu exalté soit-Il dans la synthèse des Noms. Elle est la science exclusive d'Adam tout comme Jésus en a reçu celle de l'insufflation par la permission d'Allah.

La Science ou 'ilm est abordée de manière polyvalente dans le Coran, Dieu le Plus Haut dit : "Et Il apprit à Adam tous les Noms puis Il les présente au anges et Il dit informez Moi des noms de ceux-là si vous êtes véridiques" (La Vache, 31). Ici, il s'agit d'une science dont Adam paix sur a eu la primordialité par rapport aux anges paix sur eux alors que ceux-là ont précédés dans la création Adam paix sur lui et eux. Les anges restent, cependant, incapables de répondre à Dieu, leur ignorance à l'égard de cette science est manifeste. Adam est supérieur aux anges [en tous cas ce groupe d'anges] en terme de science de tous les noms. Sa supériorité n'est pas moindre en ce qui concerne sa forme [créé par les deux Mains de Dieu], nous l'avons rappelé plus haut. Il y a plus de 90 occurrences du mot 'ilm et ses dérivations en langue arabe dans le Coran. Plusieurs versets en indiquent un sens spécifique à la Science de Muhammad prières et saluts sur lui. A titre d'exemple les versets 120 et 145 de sourate la Vache, le vocable 'ilm ici prend le sens du Livre [en tant qu'Ecriture Immuable=le Coran], et plus techniquement le sens de guidance ou hudâ. Les anges paix sur eux ne pouvaient qu'admettre leur lâ 'ilm  (non-science) en glorifiant Dieu 'azza wa jalla qui est le Véritable Maître qui enseigne la Science. Une reconnaissance de pauvreté indigène devant le Dieu 'azza wa jalla leur permit de comprendre la station réelle d'Adam. Ce qu'il ressort brièvement de ce développement est que Adam  a été privilégié sur deux plans : sa forme et la science des noms. Ce à quoi les anges contestèrent [le mot est fort] (6) l'établissement d'un calife semble s'arrêter seulement à la notion de lieutenance par relevance. La forme d'Adam [et ainsi des hommes et femmes] les a voilé de saisir le sens profond de l'Homme. Ce sens n'est rien d'autre que l'Insufflation à l'intérieur de ce dernier qui a fait de lui "un être porteur d'un secret de Dieu".

On peut tirer des données diverses du triangle de l'Androgyne de M. Valsan, le nom Adam est analysé en sigle, phénomène linguistique qu'on peut définir comme "raccourci en conservant que la première lettre de chaque mot. L'exemple ici est en réalité une siglaison à la racine consonantique (7) : ADM (le grand triangle incorporant un triangle inversé HW'). La lecture qui y apparaît est poly-directionnelle (8) et deux ternaires retiennent notre attention. La linéarité peut être de droite à gauche "dâm", descendante "ahad" et "Awm" voir triangulaire "Adam". En revanche, il est possible [et c'est moi-même qui le souligne], on peut lire de gauche à droite "mad" (Flux) et pareillement le triangle de tête à l'intérieur "awha" (Il révéle). Ces nouvelles données apportent deux notions, l'une concernant la révélation (wahy) et l'autre concernant le flux (madd). Le petit triangle de tête est le symbole de la Révélation axiale car le Alif comme principe premier de l'unité (Allah) est Celui qui fait descendre la révélation sur son Serviteur (Muhammad prières et salutations sur lui). La notion de mad [et du madad = prolongation du flux] se trouve au niveau du cycle dernier, symbolisé par le mîm de Muhammad prières et salutations de Dieu sur lui. Selon une tradition Muhammad est le Sceau des Prophètes qui reçût Jawâmi' al kalim (les Paroles Synthétiques). Il est le seul  a même de dispenser ce Flux [spirituel et divin] à la fin du cycle. Dieu 'azza wa jalla a dit : " Aujourd'hui j'ai parachevé pour vous votre Religion". Le mot dîn revête les sens : justice, dîme (et devoir), et rétribution [intégrales]. Cet ordre de lecture linéaire et poly-directionnelle fait sortir de dâm et mâd la notion de "permanence du flux de l'éternité". L'attestation de non-science des anges citée plus haut corresponde parfaitement à ce degré ou statut d'Adam paix sur lui que les anges n'ont vu que l'aspect grossier malgré leurs nature de lumière très subtile, ils n'ont pu se guider au sens premier (awwal) avant qu'Allah ne les guide. Il s'git, pour le rappeler, des données sacrées de l'étude de M. valsan et des considérations complémentaires qu'on a apportées à la lumière de la Parole d'Allah qui élucident à travers ces quelques lignes la fonction cyclique d'Adam par la science des noms. Cette science, précisons-le, n'est pas nommée la science des actions (al af'âl) qui sont contenues dans les noms. En soutenant la thèse que les noms renvoient à la descendance d'Adam chez les commentateurs musulmans chaque nom a un statut de jugement (hukm al ism), qui reflète le décret divin par le biais celui-ci s'exprime, je reviendrai lors d'une autre occasion sur cet aspect fondamental.



(1) Ibn Arabî (1165-1240), né à Murcie et mort à Damas, fut et est considéré l'un des auteurs les prolifiques de la littérature sacrée, à savoir plus de 846 écrits attribués. Pour une biographie complète voir Claude ADDAS, Ibn Arabi ou la Quête du soufre rouge. Edition Gallimard, Paris 1989.
(2) L'exemple du docétisme dans le christianisme qui n'attribue à Jésus paix sur lui que la nature humaine.
(3) Voir mon commentaire coranique de la Sourate Maryâm, notamment les versets 29-33 (publication prochaine de l'enregistrement).
(4) Cf. publication blog "Le présent m'appelle auprès du Présent" le 18 juin 2013.
(5) L'homme parfait dans un sens large est celui qui arrive à l'excellence [al-ihsân], seulement dans un sens plus technique, il renvoie à celui reçoit les trois royaumes, le corps l'âme et l'esprit. Voir Abd al Karîm al Jîlî, L'Homme Parfait. Extrait de l'Insân al Kâmil, Trad. Titus Burckhardt, Dervy 1976.
(6) La contestation sans science est un sujet qui touche les hommes aussi, à titre d'exemple les gens du Livre (Sourate Al 'Imran, 66), l'assassinat de Jésus paix sur lui (Sourate al Nisâ', 157), les fils d'Adam [genre humain] (Sourate al A'râf, 28), ..etc.
(7) A partir de cette racine, les développements sont de tendance métonymiques, voir à ce sujet Pierre Lory, Les commentaires ésotériques du Coran: d'après 'Abd al Razzâq al Qashânî, Les Deux Océans.
(8) L'article de M. Valsan ne retient pas toutes les lectures et se suffit seulement à cinq ternaires, alors que nous soulignons qu'il y a deux autres ternaires qui méritent d'être étudiés (notre étude complète paraîtra prochainement).

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